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nous traversions le mur du son

16 octobre 2011

Crosby & Nash à l'Olympia

On a beau le savoir, en être persuadés, c'est à chaque fois frappant de le constater de visu,avec toute la force du son et de la conviction qui l'accompagne : nous avions raison tout du long. 

Et quand Graham Nash, en jeans et longue chemise de grand-père se lève de derrière son piano installé sur la gauche de la scène de la scène de l'Olympia sous les vivats et flashe un signe de la paix en forme de "V", majeur et index écartés, c'est toute une époque - et une culture - qui ressurgissent, remontent à la surface, des coeurs qui chavirent intérieurement, une vérité générationelle qui (re)dit son nom, revendique sa vérité, enfouie, oubliée, moquée, décrédibilisée par ses propres reniements, renoncements et les coups de boutoir d'une machine de pouvoir dédiée à sa perte.

Pendant près de trois heures, ce vendredi 14 octobre à l'Olympia, David Crosby et Graham Nash l'ont impeccablement et puissamment rappelé : leurs chansons confession, leurs hymnes hippies, leurs saillies politiques, n'ont rien perdu de leur validité. Tout au contraire, dans un contexte où toutes les promesses du XXème siècle ont été bafouées par ceux-là même qui en ont été les plus spectaculaires bénéficiaires - les milliardaires du progrès et de l'internationalisation - ces chansons là apparaissent encore plus pertinentes, cruciales, qu'au temps (1969-75) où elles constituaient la bande son de nos rêves - espoirs et cauchemars inclus. "What Are Their Names?" - on les connaît, maintenant les patronymes des banquiers et des industriels qui, comme le souligne David Crosby, ont acheté non seulement le gouvernement américain, mais l'ensemble de la calsse politique du pays, et c'est pire encore, cette incapacité à leur demander, à eux qui en font tant, des comptes.

"C'est embarrassant de parler de ça ici, en France, où vous avez les réacteurs nucléaires les plus performants au monde, et une dépendance complète à l'énergie nucléaire, rigole David Crosby tout en s'excusant. Mais vous n'avez pas la moindre idée de quoi faire des déchets nucléaires. Chez nous, des politiques ont pensé créer une montagne de déchets qui serait interdite au public, sur laquelle on écrirait pour prévenir nos successeurs, dans 10 000 ans, Ne creusez pas là! Le problème, c'est que personne ne sait en quelle langue il faudrait le faire pour être compris dans aussi longtemps." Et Nash de dédier le puissant et inédit "Don't Dig Here" au président français en exercice. Ça ne gâche rien évidemment, que les voix soient impeccables, même si Crosby crie un peu et passe parfois en force, les harmonies toujours magiques, les musiciens impeccables de fluidité, notamment James Raymond, le fils abandonné de Crosby retrouvé avec CPR, aux claviers, et Shayne Fontaine, emprunté à Marc Cohn, à la guitare, bonifié après ses débuts difficiles au sein de Lone Justice, puis auprès de Springsteen lors de son exil californien erratique du début des années 90. "Military Madness", "Wind on the Water", "Taken At All", "In Your Name", "Wooden Ships", "Almost Cut My Hair", "Long Time Gone", "Teach Your Children" (en rappel), ce mélange d'attitude, de métaphysique, de militantisme, de joie et de désespoir, d'entrain et d'introspection, d'irréductible foi hippie en leurs convictions, leur justesse, leur contagion, voisinnent avec les classiques amoureux existentiels et oniriques tout aussi générationnels et immaculés ("Guinevere", "Lady of the Island", "Our House"), quand bien même ils curettent à la Lennon ("I Used to Be a King"), pour le plus grand bonheur d'une salle conquise où les yeux des femmes brillent et ceux des plus anciens convertis s'embrument un peu au bout de près de trois heures d'un concert entamé à toute allure avec un "Eight Miles High" envoûtant, et dont l'esprit fort et frondeur ne retombera à aucun moment.

Pas une ligne dans la presse à ma connaissance, ni avant, ni après. Hors mode, hors circuit, hors phase. Tout, sauf hors-sujet. David Crosby ne manquera pas le rappeler, comme Lennon le martelait à la fin des années 60 lorsque les Beatles s'apprêaient à passer le relais à CSNY: "N'oubliez pas que tout le monde vous ment". Encore faut-il le savoir.

À très vite.

  

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